Centrophorus granulosus — Requin-chagrin commun Centrophorus squamosus — Requin-chagrin à écailles
rugueuses Deania calcea — Requin-chagrin à museau long Centrophorus uyato — Petit requin-chagrin
Centrophorus granulosus — Requin-chagrin commun : taille
entre 100 et 160 cm, corps élancé, peau rugueuse, museau court,
coloration gris-brun foncé. Espèce ovovivipare vivant jusqu’à 1400 m de
profondeur, exploitée pour sa chair et son foie riche en huile.
Centrophorus squamosus — Requin-chagrin à écailles rugueuses :
taille jusqu’à 164 cm, corps robuste, écailles très marquées, museau
arrondi. Vit entre 145 et 2400 m, répartition très large, espèce menacée
selon l’UICN en raison de la surpêche.
Deania calcea — Requin-chagrin à museau long : taille entre
80 et 120 cm, museau très allongé et aplati, corps fin, nageoires
dorsales bien développées. Espèce benthopélagique des eaux froides et
profondes, peu connue et rarement observée.
Centrophorus uyato — Petit requin-chagrin : taille
généralement inférieure à 100 cm, corps petit et élancé, peau
granuleuse, nageoires modestes. Espèce discrète, souvent mal identifiée,
présente dans plusieurs zones tropicales et tempérées, peu de données
disponibles sur sa biologie.
Somniosus microcephalus — Requin du Groenland Somniosus pacificus — Requin dormeur du Pacifique Centroscymnus coelolepis — Requin dormeur à gros
yeux Scymnodalatias albicauda — Requin dormeur à queue
blanche
Squalidés
2 genres
env 30 esp
Squalus acanthias — Aiguillat commun Squalus cubensis — Aiguillat de Cuba Squalus japonicus — Aiguillat du Japon Cirrhigaleus barbifer — Aiguillat barbu
Nom usuel
Genre
espèce
Classification
Photos
Statut
Environnement principal
Distribution
Aiguillat commun
Squalus
acanthias
Squalidés
Vulnérable
Pleine mer
Atlantique Nord
Sagre commun
Etmopterus
spinax
Etmoptéridés
Stable
Pleine mer
Méditerranée, Nord Atlantique
Centrine commune
Oxynatus
centrina
Oxynotidés
Vulnérable
Pleine mer
Eaux chaudes et tempérées du globe
Requin du Groenland (Somniosus
microcephalus)
Description et comportement
Description physique
Le requin du Groenland est l’un des plus grands
requins carnivores, mesurant en moyenne 2,5 à 4,5 m, et pouvant atteindre
jusqu’à 7,3 m. Son corps cylindrique est dépourvu de nageoire anale, avec deux
petites dorsales en retrait et une queue asymétrique. La tête est relativement
petite, ornée de larges spiracles placés au-dessus et en retrait des yeux. La
peau rugueuse, grise à brune, porte souvent des taches blanches dues au
frottement sur le fond. Sa denture comprend des dents effilées sur la mâchoire
supérieure et plus larges, fonction de coupe, sur la mâchoire inférieure.
Habitat et répartition
Espèce principalement bathybenthique, il évolue le
plus souvent entre 200 et 400 m de profondeur, rarement en surface. Présent dans
l’Atlantique Nord et le Pacifique Nord, il fréquente les eaux polaires entre 2
°C et 7 °C, toujours en dessous de 12 °C. Des observations dans des eaux
australes (îles Kerguelen, Macquarie) restent à confirmer et peuvent concerner
S. antarcticus. Dans le fjord du Saguenay, il est détecté toute l’année jusqu’à
300 m de profondeur.
Comportement et alimentation
Ce requin combine chasse active et charognardisme.
Il se nourrit de calmars, de poissons osseux (saumons, harengs), de requins et
raies, ainsi que de mammifères marins (phoques, marsouins). Son métabolisme lent
l’amène à effectuer des migrations verticales encore mal comprises : en été, il
descend parfois jusqu’à 4 000 m pour trouver de l’eau froide, et en hiver, il
remonte vers les eaux de surface plus froides que les fonds. Les raisons de ces
déplacements demeurent inconnues.
Reproduction et longévité
Somniosus microcephalus est ovovivipare : la
femelle porte jusqu’à dix petits, chacun mesurant environ 90 cm à la naissance.
La maturité sexuelle intervient pour les individus d’au moins 4 m, soit vers 150
ans d’âge. Ces requins détiennent la longévité record chez les vertébrés : des
estimations font état de 300 à 400 ans, voire jusqu’à 500 ans pour certains
spécimens.
Régime alimentaire
Composition du régime
Poissons osseux
Morues, harengs, éperlans, et parfois
poissons plats
Céphalopodes
Calmars abyssaux et autres calamars
géants
Requins et raies
Petits squales et raies benthiques
Mammifères marins
Phoques, marsouins, et restes de
mammifères marins échoués
Charognes de grande taille
Épaulards, baleines et parfois mammifères
terrestres (carcasses de renne, ours polaire)
Stratégies de chasse et de charognardisme
Le requin du Groenland combine deux modes
alimentaires complémentaires :
Chasse active Il peut traquer lentement sa
proie en zone profonde et l’attaquer par surprise.
Charognardisme Grâce à son odorat développé,
il détecte à grande distance les effluves de chair en décomposition et
s’attaque aux carcasses de mammifères et de poissons.
Adaptations métaboliques
Le froid extrême de son milieu ralenti son
métabolisme, ce qui lui permet :
De survivre de longs intervalles sans manger
(plusieurs semaines à mois).
D’accumuler des réserves de lipides dans le
foie (jusqu’à 30 % de sa masse corporelle).
De digérer lentement toute matière organique,
même coriace.
Découvertes surprenantes
Des prélèvements d’estomac ont révélé des restes
inattendus, comme :
Des ossements de rennes ou d’ours polaires
glacés et tombés à la mer
Des morceaux de bois ou de déchets humains
immergés
Ces découvertes confirment son rôle d’éboueur des
grands fonds.
Longévité exceptionnelle
Espérance de vie
Le requin du Groenland peut vivre jusqu’à 400 ans,
ce qui en fait le vertébré le plus longévif connu à ce jour. Certains spécimens
atteignent la maturité sexuelle après plus d’un siècle de vie, soulignant un
cycle de vie extraordinairement étendu.
Facteurs biologiques
Métabolisme extrêmement lent Sa croissance ne
dépasse pas 1 centimètre par an et sa température corporelle reste proche de
celle de l’eau glacée qui l’entoure. Cette ultra-lenteur métabolique limite
la production de radicaux libres et l’usure des tissus.
Stabilité
enzymatique Contrairement à la plupart des vertébrés, l’activité de ses
enzymes ne décline pas avec l’âge. Il garde une efficacité biochimique
constante, retardant les processus physiologiques associés au
vieillissement.
Adaptations
génétiques Le décodage d’environ 92 % de son génome a mis en lumière des
gènes impliqués dans la réparation de l’ADN, la prévention des cancers et la
préservation des protéines. Ces mécanismes confèrent une résistance accrue
aux maladies liées à l’âge
Facteurs environnementaux
Habitat profond et froid Les eaux arctiques
stables et peu peuplées de prédateurs réduisent les sources de stress et de
blessures. Cette tranquillité favorise une durée de vie prolongée en
limitant les agressions externes.
Maturité
tardive La reproduction intervient vers 150 ans, ce qui répartit les coûts
énergétiques de croissance et de reproduction sur de nombreux siècles,
diminuant la pression sur les ressources internes au cours de la vie de
l’animal.
Implications pour la recherche sur le
vieillissement
Les découvertes liées à la biologie du requin du
Groenland ouvrent des pistes pour mieux comprendre les processus de
vieillissement et développer des stratégies de prévention des maladies liées à
l’âge chez l’homme. Les gènes de réparation d’ADN et de surveillance protéique
identifiés pourraient inspirer de nouvelles approches thérapeutiques dans la
médecine du futur
Habitat et distribution
géographique
Habitat
Le requin du Groenland évolue principalement dans
les eaux froides et profondes de l’Arctique et du Nord de l’Atlantique.
Profondeurs généralement comprises entre 200
et 600 m, avec des observations jusqu’à 1 800 m.
Températures de l’eau supportées : 2 °C à 7
°C, tolérance occasionnelle jusqu’à 12 °C.
Mode de vie bathybenthique, proche du fond,
dans les zones rocheuses et sédimentaires.
Présence permanente dans des fjords profonds
(par exemple au Québec) sans migrations saisonnières marquées.
Distribution géographique
Le requin du Groenland peuple essentiellement les
zones subpolaires et boréales.
Atlantique Nord : mer du Groenland, mer du
Labrador, baie de Baffin, mer du Nord.
Pacifique Nord : détroit de Béring et côtes
pacifiques du Canada et de la Russie.
Régions côtières : Groenland ; Canada
(Labrador, Nunavut, Terre-Neuve-et-Labrador, Québec) ; États-Unis (Maine) ;
Europe du Nord (Islande, Norvège, Îles Féroé).
Observations ponctuelles plus au sud :
Irlande, Royaume-Uni, Danemark, Allemagne, France, Espagne, Portugal.
Signaux controversés en eaux subantarctiques,
souvent attribués à une confusion avec Somniosus antarcticus.
Mode de reproduction et
développement
Reproduction ovovivipare
Le requin du Groenland est ovovivipare,
c’est-à-dire que les œufs éclosent à l’intérieur du corps maternel et les
juvéniles naissent vivants. Aucune connexion placentaire n’est établie ; les
embryons tirent leur nourriture de leur vitellus (sac vitellin) jusqu’à la
naissance.
Portée et taille à la naissance
Nombre de petits par portée : jusqu’à dix
juvéniles.
Taille des nouveau-nés : environ 90 cm à la
naissance.
Ces valeurs proviennent d’observations de
spécimens capturés accidentellement, car aucun accouplement ni gestation n’a
encore été filmé ou suivi en milieu naturel.
Comportement lors de l’accouplement
Lors de la reproduction, le mâle mord la femelle,
qui possède une peau deux fois plus épaisse que la sienne. Cette morsure semble
permettre la prise et la stabilisation pendant l’acte d’accouplement, comme chez
plusieurs autres requins Squaliformes.
Maturité sexuelle et durée de développement
Longueur à maturité : au moins 4 mètres.
Âge estimé à maturité : autour de 150 ans
(156 ± 22 ans).
Cette maturité extrêmement tardive s’inscrit
dans un cycle de vie lent, où croissance et reproduction sont étalées sur
plusieurs siècles, conséquence directe du métabolisme ralenti et des
conditions froides qu’il affectionne
Comportement social
Le requin du Groenland est avant tout une espèce
solitaire :
Il vit isolé la majeure partie de l’année.
Les rencontres entre individus sont rares et
liées à la recherche de nourriture ou à la reproduction.
La seule véritable “vie de couple” se limite à
l’acte de reproduction :
Le mâle saisit la femelle, la mordant dans
une région où sa peau est deux fois plus épaisse que la sienne, pour se
maintenir en position durant la copulation.
L’accouplement reste furtif et peu documenté
; les requins se séparent aussitôt après l’union.
Ce comportement polygynandre (plusieurs
partenaires pour chaque sexe) témoigne de l’absence de lien durable entre
mâle et femelle.
Absence de soins parentaux
Après la naissance :
Les juvéniles naissent complètement autonomes
(environ 90 cm) et n’ont aucun contact parental.
Ils doivent immédiatement chasser et se
protéger seuls, sans crainte ni soutien de la part des adultes.
Classification
(Squaliformes-Somniosidés)
Le requin du Groenland appartient à l’ordre des
Squaliformes et à la famille des Somniosidés en raison de caractéristiques
morphologiques précises et de son affinité génétique avec d’autres « requins
dormeurs ».
Les traits-clés des Squaliformes
absence de nageoire anale
deux nageoires dorsales (souvent munies d’un
aiguillon, même s’il peut être réduit)
corps fusiforme adapté à la vie pélagique et
profonde
dentition spécialisée, avec des dents
supérieures et inférieures distinctes
Ces caractéristiques distinguent les Squaliformes
des autres ordres comme les Carcharhiniformes (requins-marteaux, requins
citrons) ou les Lamniformes (requin-tigre, grand requin blanc).
Ce qui définit la famille des Somniosidés
nageoires dorsales particulièrement petites,
souvent sans épine ou avec un aiguillon très réduit
absence de nageoire anale
présence d’arêtes latérales sur l’abdomen,
entre les nageoires pectorales et pelviennes
corps massif et cylindrique, tête
relativement petite
adaptations à l’environnement arctique et
abysse, notamment un métabolisme lent
Le genre Somniosus, qui regroupe le requin du
Groenland, partage ces traits avec plusieurs autres espèces de « requins
dormeurs » présentes dans les eaux froides et profondes.
Confirmation taxonomique et génétique
Les études anatomiques originales et les
révisions taxonomiques ont placé Somniosus microcephalus dans les
Somniosidés dès la description de la famille par Jordan en 1888.
Les analyses moléculaires (ADN mitochondrial
et nucléaires) confirment aujourd’hui que cette famille forme un groupe
monophylétique au sein des Squaliformes, distinct des autres lignées de
requins.
Les autres membres de la famille
La famille des Somniosidés regroupe une vingtaine
d’espèces de « requins dormeurs » adaptées aux grandes profondeurs et souvent
aux eaux froides. Au-delà de Somniosus microcephalus, voici les genres
et espèces majeurs, ainsi que leurs points de ressemblance clés.
Genre Somniosus
Somniosus pacificus (requin dormeur
du Pacifique) Métabolisme très lent, longévité élevée (plusieurs décennies),
présence dans les eaux froides et profondes du Pacifique Nord.
Somniosus antarcticus (requin
dormeur de l’Antarctique) Morphologie cylindrique, nageoires dorsales
réduites, adaptation aux basses températures de l’océan Austral.
Somniosus rostratus (petit requin
dormeur) Taille plus modeste, dentition supérieure effilée et inférieure
plus large, vit en Atlantique Est et dans les zones profondes de la
Méditerranée.
Autres genres majeurs
Centroscymnus
C. coelolepis (chien de mer
portugais) : corps trapu, épines dorsales plus marquées.
C. owstonii (chien de mer
d’Owston) : répartition Atlantique Nord-Ouest, proportions et dentition
légèrement différentes.
Zameus
Z. squamulosus (requin dormeur
écaillé) : peau rugueuse, museau pointu, vie bathypélagique.
Scymnodon
S. ringens (requin bouffon) :
forme du corps comparable, longévité moindre, zones tempérées profondes.
Scymnodalatias
S. albicauda (requin à queue
blanche) : nageoires dorsales proéminentes, queue contrastée,
Indo-Pacifique.
Deania
D. calcea (requin piquant) :
corps allongé, épines dorsales pointues, répartition mondiale en eaux
profondes.
D. profundorum (requin profond)
: morphologie raffinée et penchant pour les zones abyssales.
Points communs et différences
Tous présentent l’absence de nageoire anale
et des nageoires dorsales réduites ou épineuses.
Ils partagent un mode de vie bathypélagique
(200–4 000 m) et une peau couverte de denticules dermiques.
La dentition effilée en haut et plus large en
bas est typique de Somniosus, moins marquée chez les autres genres.
La longévité record (300–500 ans) demeure
unique au requin du Groenland ; la plupart des somniosidés vivent moins de
100 ans.
Les Somniosidés sont surnommés « requins dormeurs
» en raison de leur allure et de leur mode de vie particulièrement lentes et
passives. Dans la littérature, on les décrit souvent comme « mous » et « lents
», avec une vitesse de nage très réduite et un métabolisme si bas qu’ils
semblent passer leur temps à somnoler entre deux repas.
Leur morphologie renforce cette impression : de
petits yeux, une petite bouche et des nageoires peu développées leur donnent une
silhouette presque immobile sur le fond marin. Ces caractéristiques font qu’ils
restent de longues heures à l’affût, parfois posés sur le sédiment, avant de se
mettre en mouvement pour saisir une proie, d’où le terme « requin dormeur » qui
leur a été attribué